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Loire-Atlantique. Des débutants seront à temps plein devant les élèves, dénoncent les syndicats

Ouest-FranceAgnès CLERMONT.Publié le 23/08/2022 à 18h50

Faire la classe à des écoliers, des collégiens ou des lycéens ? Le métier attire de moins en moins. Un indice qui ne trompe pas : 4 000 postes restaient à pourvoir en France à l’issue des concours de l’enseignement, cette année. À peu près un poste sur six.

Eu égard à cette pénurie d’enseignants, l’organisation de la rentrée scolaire promet d’être acrobatique. Et si le ministère de l’Éducation nationale fait des pieds et des mains pour trouver comment mettre un prof dans chaque classe, c’est au prix de mesures jugées déplaisantes par une partie non négligeable des principaux intéressés.

Temps partiels refusés

Ainsi, de très nombreuses demandes de passage à temps partiel ont été refusées en Loire-Atlantique, témoigne Adrien Leclerc, secrétaire général adjoint de FO dans le département.

Idem pour les lauréats 2022 des concours de l’enseignement. Ceux, qu’en interne, on appelle les stagiaires, qualificatif qui leur restera pendant leur première année de formation. Pour la première fois depuis dix ans, « 60 % d’entre eux environ » vont se retrouver en classe à temps plein, alerte Marie Haye, pour le Snes-FSU. Pour y tenir le rôle de l’enseignant. Grâce à ces nouveaux venus inexpérimentés, le manque de professeurs sera moins criant. Jusque-là, les stagiaires n’étaient sur le terrain scolaire qu’à mi-temps.

Certes, précise le syndicat, ceux qui seront à temps complet sont aussi ceux qui ont obtenu un master des métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation. Mais face aux élèves, ils seront « débutants, sans l’apport de l’analyse théorique. D’ailleurs, à cause de leur temps complet, la formation dont ils vont bénéficier sera une formation au rabais. Une bouée percée », ajoute Marie Haye.

Démissions

Mais ce qui sidère le plus la FSU, c’est encore, dit le syndicat, le manque de considération porté à ces futurs profs par l’administration. Du fait de la pénurie de candidats, « on aurait pu les traiter avec égards. Mais non : ils ont été affectés uniquement en fonction des besoins du service. »

Résultat, pointe la FSU, ils sont nommés ici ou là sans tenir compte de leur situation familiale. Sur des mi-temps alors qu’ils demandaient des temps plein et inversement. Beaucoup vont devoir vivre loin de leur conjoint. « Cet été, on a été littéralement assailli de question de stagiaires en difficulté. En dix ans, on n’avait jamais vu ça », s’insurge Marie Haye.

Le niveau de mécontentement de ces nouveaux collègues étant élevé, les syndicalistes sont très inquiets : « Tout cela va se traduire par des démissions. Le navire prend l’eau. On est en fonctionnement dégradé. » Et quand les stagiaires ont demandé le réexamen de leur affectation, il leur a été répondu qu’aucun changement n’était possible.

Concours en plus

Les chefs d’établissement eux aussi sont stressés, confirme Franck Antraccoli, proviseur au lycée Guist’hau, à Nantes, et secrétaire général de l’ID-FO (syndicat des personnels de direction de l’Éducation nationale). Car à la veille de la rentrée, comme ses collègues, il sait que derrière la question cruciale – y aura-t-il assez de professeurs en septembre ? –, une autre pointe : « Qui seront ces enseignants ? Seront-ils formés ? Ce métier n’est pas simple. Il ne suffit pas de mettre quelqu’un devant chaque classe. »

La FSU et FO avancent deux solutions : recruter les lauréats des concours de l’enseignement reçus sur liste complémentaire. C’est-à-dire ceux qui ont obtenu une note suffisante, mais n’ont pas eu d’affectation. Et organiser des concours exceptionnels de recrutement, vite.

Contactée, l’inspection académique a répondu « qu’à ce stade de la préparation de la rentrée », elle ne pouvait pas donner d’informations consolidées : « Nous ne disposons pas d’une situation totalement stabilisée, nous y travaillons tous les jours ».