Déclaration liminaire au Blanchet du 6 décembre 2023

Madame la Rectrice 

Vous voudrez bien excuser le caractère décousu de cette déclaration liminaire mais le temps m’a manqué pour me montrer à la hauteur de cet exercice tant l’actualité a rebattu les cartes de ce que j’avais convenu d’écrire avec mes collègues du bureau académique. 

Je vais tout d’abord, au nom du syndicat, vous remercier vous et vos services pour l’accompagnement de notre collègue du bureau départemental ID, Stéphanie DUCOUSSET, lâchement agressée avec son adjointe et un agent hier soir par deux voyous dans l’enceinte de son établissement. Preuve en est que notre profession n’est plus exempte de toute violence physique. Nous souhaitons donc apporter notre soutien à la direction du collège Jules Flandrin ainsi qu’aux équipes EN et du département. 

Bousculé, disais-je, car si nous prenons agréablement acte de la primeur des annonces du Ministre à ses cadres, nous sommes partagés entre sidération et abattement. Les ministres changent chaque année et chaque année, on tricote et on détricote au point d’en avoir le tournis. Nous sommes devenus des girouettes même plus crédibles tant les réformes s’enchaînent avec leur lot de contradictions, de contrepieds, de fausses ou de bonnes idées. Cette fois au moins, nous pourrons travailler notre préparation de rentrée avec les cartes quasiment en main. 

Cependant, nous sommes en surchauffe et ne voyons plus le cap tant le navire Education nationale en change au gré des valses ministérielles. Et bien sûr, qui in fine doit tenir un nouveau discours contrevenant au précédent avec une sincérité d’arracheur de dents ? Les perdir. Ceux-là même qui disent « noir » un jour puis « blanc » le lendemain. Du grand 1984. Mais la mémoire des gens n’est pas à ce point défaillante.  

  

Outre l’inventaire à la Prévert dont je vous ménagerai le recensement, ce qui pêche, c’est la faible considération pour les “perdir” qui se débattent au quotidien pour mettre en place, bon an mal an, les dernières réformes ou aménagements de réformes concoctés à la va-vite.  

Comment se matérialise cette perte de considération ? 

Tout d’abord, elle tient à la transformation de notre métier. Plus les tâches s’empilent, moins nous pilotons, plus nous exécutons … MAL. Serions-nous devenus des êtres à ce point décérébrés que nous ne soyons plus capables de stratégie, de réflexion collective, d’esprit d’initiative ? Il est fort à craindre que cela s’avère rapidement le cas. De cadres supérieurs, nous sommes transformés en ouvriers spécialisés (sans aucun mépris pour ces personnes, bien entendu, mais ce n’est pas notre métier). 

Ensuite, il est regrettable et même inadmissible que les nouveaux chefs d’établissement adjoints stagiaires ou faisant-fonction ne soient étrangement pas tout à fait comme les autres, tout en faisant le même métier. En guise de remerciement pour le pas qu’ils sautent pour entrer dans notre corps de moins en moins attractif, on leur dit que pour la prime de 1000€, ils devront attendre d’être titulaires…ce qui ne sera pas forcément le cas des faisant-fonction. S’ils sont encore profs, peut-être pourraient-ils donc prétendre à un PACTE ? Nenni ! Ce sera donc pour la gloire. Nul doute que l’on ait le sens de l’accueil dans notre noble administration. Les collègues professeurs syndiqués en rient à gorge déployée eux à qui on annonce encore 156€ pour 3h de stage de réussite. Pas nous, les chefs, car nous avons honte de tout ramasser en regardant nos adjoints se dépêtrer avec le RCD. J’appellerai ceci “L’école de l’injustice”… 

Une adjointe stagiaire médusée par tant d’iniquité me disait récemment que le dévouement aux missions d’utilité publique se payait de stress mais d’aucune autre forme de reconnaissance. Des solutions, le ministère a su en trouver pour payer les AED en HSE, créer des bureaux des entreprises, financer à renfort de milliards d’euros le CNR et le PACTE sans compter la gratification aux lycéens professionnels. Pour nos collègues, le néant de l’injustice.  

Alors non, nous ne ferons plus sans une réelle reconnaissance qui passera par des taux améliorés de promotion et des primes dignes de notre statut. 

Je vous remercie de votre écoute et des réponses que vous pourrez nous apporter. 

Arnaud MAREY 

Secrétaire académique IDFO 

 
 
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