Déclaration liminaire BLANCHET 9 octobre à GRENOBLE
Madame la Rectrice,
Nous souhaitons tout d’abord vous faire part de notre grande émotion suite à la disparition prématurée de notre collègue proviseur adjoint au lycée Ferdinand Buisson, Eric Viollet, et vous remercions du message envoyé.
Cette nouvelle année a une tonalité quelque peu étrange avec des errements politiques qui nous auront permis de vivre un temps sans les usuelles déclarations d’une « rentrée techniquement réussie » avec un professeur face à chaque classe et même un personnel tout court à son poste. De cela nul ne se berce d’illusions même si les services du rectorat ont sans aucun doute fait du mieux qu’ils le pouvaient au vu de la pénurie en ressources humaines dont ils sont d’ailleurs eux-mêmes victimes.
Notre enquête de rentrée ayant recueilli 105 réponses révèle que l’essentiel des postes non pourvus sont la résultante du « choc des savoirs » avec 37% des établissements concernés par une absence de professeurs de lettres et 32% de mathématiques. Les contacts avec les IPR ont été globalement perçus comme éléments facilitateurs face à l’insatisfaction majoritaire des réponses ou non-réponses de la cellule de rentrée. Aussi n’est-il pas étonnant que seul 1/4 des répondants ait vécu une meilleure rentrée. Que dire également du dialogue, si c’en est un, sur l’attribution au compte-gouttes des enveloppes PACTE via un fichier excel truffé d’inexactitudes ? Après la gabegie et le forcing de l’an passé, l’ère des restrictions qui entraine une impossibilité de généraliser l’offre de Devoirs Faits, outil pourtant reconnu de lutte contre les déterminismes sociaux-culturels.
Madame la rectrice, ID a fait de nos conditions de travail son cheval de bataille au travers des avis adoptés le 23/11/23 en formation spécialisée du Comité social d’administration ministériel. Les réponses du Ministère sont affligeantes et relèvent du Grand Coluche : « dites-moi ce dont vous avez besoin, je vous dirai comment vous en passer ». Et pourtant, comme l’Inspection générale le note, notre hiérarchie se doit de veiller à notre santé et cela ne nous fait que déplorer, pour ne pas dire condamner, ces rodomontades sémantiques dont certains scribouillards d’arrière-cabinets sont adeptes.
La transition est toute trouvée pour vous demander si ces dernières années, le rectorat a été saisi de fiches SST rédigées par des personnels de direction. Si leur médiatisation par les syndicats enseignants est grande, les perdir en semblent totalement exclus. Se mettre à nu, dire que nous sommes épuisés et plus vraiment maîtres de notre temps en matière de construction pédagogique signifierait une condamnation à une vie professionnelle rabougrie : pas de promotion, pas de mutation sur le poste rêvé. L’auto-censure fait rage dans notre profession ce qui ne fait qu’aggraver le mal-être, la perte de sens, les troubles du sommeil etc. Mais quelle autre carrière embrasser quand on ne s’y retrouve plus ? Car en coulisses, de nombreux perdir cherchent un plan B : rupture conventionnelle, retour dans l’enseignement, démission, passerelles plus que rares vers un autre ministère ou une collectivité.
Cette profession, nous l’avons certes choisie. Mais la débauche d’énergie au péril de notre équilibre ne saurait masquer le naufrage du navire Education nationale qui ne fait qu’accompagner une nation en déclin.
C’est pourquoi, Madame la Rectrice, nous souhaitons que partout où les collègues travaillent sans une équipe de direction complète (chef d’établissement adjoint, SG, directeur adjoint chargé de SEGPA ou CPE), l’exercice de leurs missions en mode dégradé soit reconnu officiellement afin de se recentrer sur la gestion des essentiels. Nous ne serons plus des médecins scolaires apocryphes donnant notre imprimatur à la rédaction de PAP, nous ne pourrons plus piloter les PIAL gratuitement, nous ne pallierons pas l’absence de SG en nous improvisant docteurs ès Op@le…
Je vous remercie de votre attention.
Arnaud MAREY
Secrétaire académique ID