INTERVENTION IDFO 91- réunion Recteur préparation de rentrée 2025- 28 janvier 2025
(Contexte : cette prise de parole s’est effectuée alors que sur le parvis de la salle, 40 personnes manifestaient avec des casseroles, des sirènes, des alarmes, de la musique)
Dès la prise de micro :Musique : https://www.youtube.com/watch?v=mTmcwCw5Ezg
Monsieur le Recteur,
Chers collègues,
Vous aurez sans doute reconnu la musique du radio réveil dans le film « un jour sans fin » de 1993.
« Un jour sans fin » raconte l’éternel recommencement de la journée du 2 février ; celle d’un journaliste météorologue, Phil Connors incarné par Bill Murray, qui n’a pas envie d’assister au jour de la marmotte, dans un lieu reculé cerné par le blizzard. De ce jour sans fin, il n’en sort véritablement que lorsqu’il tombe amoureux de son assistante incarnée par la magnifique Andie McDowel. Et chaque matin, il entend : « Debout les campeurs et hauts les cœurs. N’oubliez pas vos bottes parce que ça caille aujourd’hui. Ca caille tous les jours par ici», etc…
Si mon intervention commence par cette référence ce n’est pas, vous l’aurez bien compris, pour vous convaincre de l’intérêt que je porte à ce film.
Il faut qu’on vous le dise encore et encore il faut qu’on utilise d’autres formes afin d’être enfin écoutés: nous vivons un jour sans fin ! Et cela depuis bien trop longtemps. Chaque matin c’est la même musique, celle du poids des charges et des responsabilités ; celle du choc entre nos réalités de terrain et les injonctions permanentes, celle du conflit entre nos analyses, nos diagnostics et le plaquage de réformes qui se réforment éternellement. Chaque journée c’est Le cortège de problèmes, plus au moins graves, à résoudre. Chaque jour c’est la mise en difficulté faute de personnels. Indépendance et Direction le dit ici depuis plus de 10 ans et se réjouit que les autres OS se joignent depuis quelques temps à nous : les conditions de travail se dégradent sans fin. Les remerciements ne remplacent pas la reconnaissance sonnante et trébuchante.
Ceci n’est pas une intervention. Ceci est un cri !
Pour en revenir au film cité tout à l’heure, le héros met tout en œuvre pour se sortir de cette boucle interminable. Il prend des risques, se met en danger mais, longtemps, il ne parvient pas à s’extirper de ce qui devient au final un cauchemar. Bien évidemment, il y a de l’humour dans les situations et notre héro n’en manque pas. Nous non plus ! Et cela nous sauve. Enfin, parfois. Et nous sommes de moins en moins nombreux dans ce cas-là, car, ce qui domine chez nous c’est l’épuisement. Nous voulons en sortir de ce jour sans fin, de ces années sans fin devrais-je dire !
Alors, de qui devons-nous tomber amoureux pour sortir de là ? Mais devons-nous tomber amoureux ? Contrairement aux scénaristes et réalisateurs du film, nous ne pouvons faire reposer la sortie de cette infernale spirale par un effort ou bien une volonté de notre part. Ce n’est pas à nous de tomber amoureux. Nous le sommes déjà et pleinement : nous aimons notre métier, nous aimons nos élèves, nous aimons le service public d’éducation. A Indépendance et Direction nous estimons que nous serons délivrés de ce jour sans fin lorsque c’est le ministère que deviendra amoureux de nous… Et pour cela, je crains qu’il faille malheureusement encore attendre…
Alors, au nom d’ID/FO, nous allons nous souhaiter quand même de sortir de ce jour et ces années sans fin. Nous allons nous souhaiter une bonne année à l’aune de nos revendications :
- Une année où la revalorisation salariale sera réelle c’est-à-dire où la justice sera rétablie pour le passage à la HC, où plus aucun personnel de direction ne débutera scandaleusement en dessous des 3000€ net et où le RIFSSEP, annoncé comme une belle revalorisation, ne se bornera pas, au final, à l’équivalent d’une pizza par mois.
- Une année où nos conditions de travail changeront. Cela commence par des équipes complètes et formées, des logements de fonction décents, des mails, des appels qui trouvent des réponses aussi rapides que les situations l’exigent ; des logiciels et des applications opérationnels. Cela commence par là, la bien traitance de vos personnels !
- Une année où il y aura suffisamment de professeurs et de professeurs formés, des dispositifs UPE2A et des AESH couvrant les besoins réels.
- Une année où nos collègues qui ne peuvent faire face au quotidien déjà lourd n’auront plus de pression liée à ce new management, nous parlons ici des évaluations d’établissement,
- Une année où tous nos élèves sortants des collèges ainsi que nos secondes obtiendront une orientation choisie. Il parait que l’Essonne est « Terre d’avenir »…
- Une année où on ne demandera pas au personnel de direction de collège de remplir la fonction de coursier au moment des examens. D’ailleurs, sur ce sujet M. le Recteur, nous n’avons toujours pas de réponse à la question qui a été posée en G9 académique l’an dernier…
- Une année où il sera mis définitivement fin à la réforme « usine à gaz » qu’est celle de la réforme du choc des savoirs
- Une année où la réforme des LP tiendra compte des incidences pratiques sur fonctionnement des établissements
- Une année avec des moyens suffisants, distribués suffisamment tôt pour répondre aux besoins des élèves. Le montant des DGH ne répond toujours pas aux besoins pédagogiques réels sur notre département. Et nous ne savons toujours pas le montant des IMP et PACTES ! Comment peut-on préparer honnêtement la rentrée 2025 ?
- Une année où l’accompagnement des jeunes sera vraiment pris en compte par nos pôles de santé et où nos élèves en souffrance trouveront des relais adaptés et en nombre suffisant
- Une année où l’on ne courra pas après des informations essentielles, comme en ce moment, où les répartitions se font sans cadre général, sans communication institutionnelle. Marre de faire des revues de presse pour simplement travailler !
- Une année où seront mises en place des brigades de remplacement pour les personnels de direction.
- Une année où sera prise en compte l’usure liée à nos carrières, problématique qui n’a jamais été abordée vraiment,
- Une année où les collègues de Mayotte ne seront plus seuls à assumer ce que l’Etat tout entier devrait réaliser.
- Une année avec des moments de respirations, des possibilités de réflexions avec nos équipes,
- Une année où l’expertise des cadres que nous sommes sera prise en compte et où nous ne serons plus des courroies de transmission d’une machine qui tourne désormais dans le vide
En somme, une année sereine
J’ai débuté cette intervention en musique. Je la conclus par une citation d’un grand syndicaliste, fondateur de Force Ouvrière et Prix Nobel de la Paix en 1951, Léon Jouhaux : « ne pas se battre, c’est accepter. Et accepter, c’est déjà abandonner. » Indépendance et Direction ne va pas abandonner. Nous refusons l’injustice et nous nous battrons pour obtenir les moyens que mérite l’Education nationale en Essonne.
Bon courage ! Bonne chance ! Bonne année à tous !
Merci pour votre écoute
Anne Koch, DD 91